With texts by Maxime Müller.
Black parallels painted on black parallels, with a vibrating effect, using lights from cinema, so that when the viewer moves inside the installation space, the parallels appear and disappear.

The line is something that often occurs in my art
productions, may it be in plastic art, music, or even
on the body.
It’s a big semantic shelf on which I materialise a big
quantity of values, as much conceptual as existential.
When Sartre writes about existentialism, explaining
that you can only trust the present moment because the past is an adaptation of the memory and
the future only a projection, and that in any case
all of that happens in a present action, I find it very
frustrating.
If, by example, I try to transpose this in a very simple formal way I get a point in the middle of a blank
page. Thus if I consider a line rather than a point the
feeling of loneliness lightens up a bit because there
is a direction, a dynamic and even a temporality.
Another heavy theme is the question of choice, the
hypothetical possibility of “another way”.Therefore
it’s not a point anymore but a wild and uncertain
amount of scribbles, a tiring confusion of dots.
But I keep the line and accompany it by others,
parallels.
Using several layers of different opacity and brightness of black paint, and the light on it at a fix point,
the parallels appear and disappear in the eye of the
viewer while he/she walks around the lines.
So it comes to this simplicity of: «everything goes in
the same direction, that way». Some how life is also
like that : everything leads to the present moment,
it’s just the present moment that’s always moving.
It’s lighter.
“Il n’est pas évident d’appréhender à priori ce qu’est une ligne. “Ligne” est le genre de signe trop utilisé en français dont le sens se débite au point de ne plus couvrir qu’un élément essentiel, certes facilement reconstituante par une approche constructiviste, mais difficilement transmissible sans un effort cérébrale inconsidéré. La ligne a été fracturée par la langue. La ligne que l’on trace, la ligne éditoriale, la ligne de bus, la ligne d’un design, la ligne que l”on doit conserver grâce à des yaourts, la ligne de séparation des eaux, la ligne d’horizon, etc. Certains mots gagnent du sens à force d’être répétés, d’autres en perdent, la ligne est de ceux-là; et ces mots, dont le sens doit sans cesse être reconstitué, sont par essence les terrains fertiles de l’art. Toutefois, en tentant d”aller y piocher un reste de sens et en s’appliquant de bienheureuses œillères linguistiques il est possible d’en découvrir quelques définitions. Une ligne possède toujours une forme, une longueur, et une épaisseur. Son épaisseur peut être nulle, elle existe tout de même. On touche ici à un premier point important. Il est impossible de percevoir par les sens avec lesquels nous appréhendons habituellement les formes, la vue ou le touché, une ligne dont l’épaisseur est zéro. Pourtant le chemin que suit un marcheur dans une ville, la courbe que décrivent les bras d’un danseur, la trajectoire d’une balle qu’on lance, restent des lignes. Elles peuvent être perçues ou pressenties, calculées. Elles existent. Elles existent dans le monde de l’information pure. Seul leur accomplissement permettrait de leur donner une épaisseur. Une épaisseur éphémère, à un instant t; et seule cette épaisseur permettrait de leur donner une existence dans le monde des mouvements et des chocs et donc de les rendre communicables. Cependant leur inaccomplissement n’enlève rien à leur existence. L’épaisseur d’une ligne ne définit que son degré de communicabilité, de potentiel, zéro à infini. Contrairement à l’épaisseur, la longueur d’une ligne ne peut être nulle. Une ligne possède intrinsèquement un début et une fin distincts, éventuellement interchangeables - une ligne n’a pas forcément de sens - mais distincts. Une ligne de longueur nulle serait un point, une portion quelconque mais atomique d’elle-même. Il est impossible de reconstituer la ligne à partir du point alors qu’il est possible de définir une infinité de points à partir de la ligne. Un point peut être considéré comme une partie d’une ligne avec un
déficit d’information
qui empêche sa reconstitution. Dans ce cas une ligne est un ensemble
infini de points distincts, ce qui implique une temporalité nécessaire.
Paul Klee s’amusait à dire qu’ ”une ligne est un point qui est parti se
balader”. L’exploration de ces points, ou ensemble de points - souslignes ou tronçons - ne peut se faire que temporellement. Il n’est pas
possible de réfléchir à la fois la ligne dans son ensemble et chacun de
ses points - de ses instants - en même temps et instantanément. Pour
explorer une ligne —pour la vivre— il faut en passer par une déambulation. Il faut parcourir son espace.
Pour communiquer une ligne il faut lui donner de l’épaisseur et permettre le temps de son parcours.
Ce qui définit une ligne en particulier par rapport à la
ligne en général c’est son tracé. C’est sur le tracé que se définissent
tous les mots qui héritent du sens de ligne. La droite, la courbe, l’entrelacs, l’arabesque, la spirale, le polygone, le gribouillage, la fractale
etc. Le tracé de la ligne exprime sa singularité, son individualité, sa
distinction dans la masse des lignes. Le tracé de la ligne est porteur de
sens. Parmi l’infinité des tracés possibles il en est un qui se distingue
par ses qualités inexorables qui sépare l’ensemble des lignes comme
le zéro sépare l’ensemble des nombres.
La droite débute à moins l’infini et termine à plus l’infini.
Elle est constante et implacable, impossible à représenter —nous n’en
voyons que des segments qui par définition
n’en sont qu’une infiniment petite partie. Tous ses points se valent, aucun n’a la prétention
de marquer le début d’un moindre changement ni d’être le garant en
son nom propre de la continuité. La droite est la représentation symbo
lique parfaite de la perception qu’a l’humain moderne du temps. Pour
l’humain la droite c’est le temps, et le temps est une droite. Le segment de droite, ce qu’il peut symboliser, c’est une portion de temps, un
accordé, un moment une vie, une inéluctable limitation d’un concept
infini.
Dans un temps cyclique le retard n’existe pas. Les travaux sont finis
quand ils sont finis. Il n’y a que des degrés - ou des radiants - de vitesse. Dans un temps linéaire, quand la certitude est sise que seul un
segment est accordé et que l’exploration de la ligne ne peut se faire
point par point il devient impossible d’être dans les temps. On ne peut
appréhender la ligne en dehors du parcours de son tracé, chaque point
en étant potentiellement la fin.”
Maxime Müller, 2016.
